Nous avions eu la chance d’échanger avec Josépha il y a quelques années et nous sommes ravies d’avoir pu discuter avec elle encore une fois pour parler de sa deuxième grossesse autour de notre thématique « Soi ». Josépha est toujours aussi douce, aussi drôle, aussi bienveillante, peut-être plus que jamais car elle est désormais à 100% dédiée à son Loma Club. Ensemble, nous avons parlé de l’accueil d’un deuxième enfant, de la différence de prise en charge en Belgique, où elle réside désormais, mais aussi de son couple, de son moral, de son travail. Bref, elle nous dit tout et c’est toujours une forte dose de bonheur et d’amour.
– Peux-tu te présenter? Quel est ton parcours? D’où tu viens…
Josépha Raphard a trente ans, deux enfants, elle est la fondatrice du Loma Club, un groupe de paroles pour parents, autrice du livre “Mères”, réalisatrice de documentaires et influenceuse car son compte Instagram participe à libérer la parole sur la maternité et déconstruire les préjugés.
– Comment s’est passée ta deuxième grossesse? Est-ce que c’était différent?
Oui, c’était différent parce que j’étais déjà mère donc ça change tout! Après, je n’aime pas beaucoup être enceinte… Je mesure ma chance de pouvoir l’être, je suis contente à l’idée d’accueillir un être humain mais ce n’est vraiment pas ma partie préférée. L’accouchement pour moi c’est une vraie libération. En plus quand je suis enceinte je suis terrorisée, je sais qu’on fait plein d’examens mais je ne suis jamais vraiment tranquille. Pour cette seconde grossesse, j’ai voulu l’annoncer tôt, avant les 3 mois, parce que c’est une période compliquée mais je voulais transmettre le message que si je perds ce bébé, je veux en avoir parlé. J’avais pas envie de le taire, la grossesse les 3 premiers mois, elle existe. Dans mon travail, je rencontre beaucoup de femmes pour qui c’est une vraie souffrance. En plus, pour moi, c’est une période où je suis très malade, je tombe dans les pommes, je vomis beaucoup, je perds du poids…
– Comment s’est passé ton deuxième accouchement? Était-il différent du premier?
Oui très différent car je n’ai pas eu le même suivi que pour la première grossesse. En Belgique, j’ai été accompagnée par un cabinet de sage-femmes privé. Elles m’ont suivi tout du long et je savais que certaines d’entre elles allaient m’accoucher. La préparation à leur côté est géniale car elles te forment sur plein de choses. T’as l’impression que tu vas devenir sage-femme! Pour ce 2e bébé, je voulais un accouchement physio. La première fois, j’ai eu un accouchement classique (en France), hyper médicalisé… J’ai eu une hémorragie de la délivrance et ces semaines de néonat on été difficiles, on va pas se mentir. A l’époque, je ne faisais pas ce métier et en faisant ma formation je me suis rendue compte à quel point j’avais été mal accompagnée.
– Comment était ton post-partum?
L’accouchement ayant été différent, le post-partum était, lui aussi, complètement autre. En Belgique (en France aussi selon le suivi choisi), grâce au suivi avec les sages-femmes, elles m’ont laissé sortir car tout allait bien. En revanche, côté hôpital, il y a quand même un petit combat avec l’administration un peu infantilisant où tu dois signer une décharge car ils prennent zéro risque. Mais bon, juste après mon accouchement, j’étais debout, en forme, et ravie de rentrer à la maison. Ce qui a été génial c’est que les sage-femmes sont venues à la maison tous les jours pendant 2 semaines. Et pas en coup de vent! Elles restent 1H30-2H, prennent le temps pour la mise au sein, elles t’aident si tu as un enfant plus grand, elles lui parlent, elles veillent à ce que ça aille bien sur tous les fronts enfait. Elles parlaient aussi avec mon mec. C’est une aide sur le plan physique mais aussi mental qui fait vraiment la différence. Tant et si bien que d’ailleurs j’ai paniqué! Je me suis dit c’est pas normal que j’aille si bien, je peux pas aller si bien. J’ai eu une chute hormonale évidemment mais pas de baby blues comme la première fois. Après voilà, ce suivi exceptionnel par des sages-femmes il a un coût.
– La maternité entre l’idée que tu en avais et la réalité c’est comment?
De mon expérience personnelle, c’est plus facile que ce que je pensais. On nous met des idées dans la tête, on nous dit que notre vie va changer, que ça va être difficile mais finalement quand on s’écoute, ça glisse tout seul.
– Ça a changé quoi pour toi de devenir maman?
Tout! Ça a changé la ville où j’habite déjà. Je suis devenue mère à 25 ans à Paris, c’est jeune. J’étais en pleine construction, donc ça a tout changé, je ne pense pas que ça aurait autant chamboulé ma vie à 35 ans. Aujourd’hui tout tourne autour de moi, pas de mes enfants. Je prends beaucoup plus soin de moi. Je vais souvent au sport par exemple. Je le fais pour être en bonne santé pour mes enfants, pour être patiente avec eux, j’en ai besoin. Donc pareil je vais encore plus boire des verres avec mes copines pour être bien, pas leur en vouloir de me freiner sur quoi que ce soit. Si t’es H24 avec tes enfants tu deviens tendue. C’est dur d’exister quand on est maman mais c’est important de prendre soin de soi. En me faisant passer en premier, c’est eux que je fais passer en premier.
– Qu’est-ce qui t’a le plus surpris?
De tout aimer. Au début, je me disais, ma fille va grandir, je vais être triste… Et en fait pas du tout. Ce qui est merveilleux c’est de voir mes enfants grandir, de découvrir qui ils sont, de les accompagner. Parce que t’apprends ça aussi, que t’as beau faire ce que tu veux, ils ont la personnalité qu’ils ont.
– Quelle est ta plus grande contradiction?
Moi-même. Je suis une énorme contradiction! Je me dis que j’ai pas besoin de grand chose pour me satisfaire, mais je travaille avec des clients toujours plus gros pour me protéger matériellement. Je dis à ma fille qu’on peut se satisfaire de pas grand chose, je prône la liberté, évidemment c’est facile, je ne stress pas sur l’argent donc je trouve ça hypocrite. L’entrepreneuriat c’est une galère! J’ai une autre contradiction c’est que souvent je dis que tel ou tel truc est faisable parce que je suis à mon compte. Mais c’est aussi faisable parce que je gagne correctement ma vie. Ce qui est compliqué quand t’as des enfants et que tu es à ton compte c’est que tu te dis « Et si demain ça marche plus, je ferai quoi? » C’est compliqué quand tu vis de ta passion. Mais maintenant je me dis, j’ai su me débrouiller une fois, je saurais le faire une 2e fois.
– Est-ce qu’il y a eu des impacts dans ton couple?
Non. On s’aime encore plus et on fait encore plus attention l’un à l’autre. L’idée de passer de couple à famille c’était ok déjà parce qu’on est très famille tous les deux. On a voulu des enfants parce qu’on s’aimait et un 2e enfant parce qu’on s’aimait tellement à trois qu’on a voulu être 4. Le couple prend cher parce qu’on a moins de temps l’un pour l’autre mais il faut en parler. C’est pas parce que tout le monde dit que le couple souffre que c’est une généralité. Je rencontre plein de femmes comme moi. C’est du travail oui. Du travail sur soi déjà. Moi parfois je me dis « Quand je dis ça est-ce que ça va vraiment faire avancer la discussion ou est-ce que je me décharge sur lui? » Ca peut arriver qu’on soit pas gentil l’un avec l’autre, dans ces moments-là, l’autre est en première ligne, donc moi je pense qu’il faut toujours mettre la gentillesse dans le couple. Après, par exemple, je me dis que si je veux lui reprocher quelque chose mais que je sais qu’il ne peut pas le changer pour le moment, je lui en parle pas tout de suite. On accorde beaucoup d’importance à se toucher aussi : un bisou, un câlin, une main dans le dos, je lui dis qu’il est beau, que c’est un super père, je le pense si fort et c’est tellement important. C’est quelque chose que j’ai appris en faisant un travail sur moi, et je continue à travailler sur moi, il faut le faire! C’est du boulot mais c’est essentiel. J’ai pas grandi dans un modèle similaire, même si l’amour et le respect étaient omniprésents. J’ai été élevée par une mère célibataire longtemps puis par un beau-père, c’est grâce à eux que je suis comme ça.
– Aujourd’hui comment ça va?
Super bien! Je travaille à mon compte tout le temps, le lundi je travaille pas, en tout cas, je ne prévois pas de visio. Il m’arrive d’écrire pendant que mon fils joue. Je mesure ma chance de travailler comme j’en ai envie en aménageant le temps de travail comme je le souhaite, de pouvoir profiter de mon amoureux de mes enfants, de faire un travail que j’aime. Je sais aussi reconnaitre que je sais dire stop, mon travail même si je l’adore, n’est pas ma vie. Aujourd’hui je n’ai pas de crèche, ma fille va à l’école. Étant tous les 2 à notre compte on se relaie mais parfois l’un ou l’autre va travailler le week-end, sacrifier des soirées. Le tout est de trouver le juste équilibre…