Vous connaissez sans doute la marque de dessous Noo qui cartonne et qu’on ne présente plus mais connaissez-vous l’un des deux visages qui l’a fondé? Elissa Regnier-Vigouroux est une femme qui connait bien les femmes. Elle les habille depuis presque 10 ans de robes fendues, de lingerie pointue, et ce entre Paris et Marseille où elle est désormais installée. Si Noo est un de ses bébés, Elissa est aussi la maman de 3 garçons dont 2 jumeaux. Donc le sujet du corps c’est vraiment quelque chose qu’elle connaît bien! Voici son parcours, ses confidences et ses conseils.

PARLONS UN PEU DE VOUS
Peux-tu te présenter ? Quel est ton parcours ? D’où tu viens …
J’ai 39 ans dans quelques semaines, je vis à Marseille depuis 4 ans et demi. Nous avons emménagé quand nos jumeaux Raphaël et Andréa avaient 2 mois et je suis la co-créatrice de la marque Noo depuis bientôt 10 ans. Avant cette aventure j’étais salariée, je travaillais pour Le Monde et le groupe Marie Claire à la régie pub mais j’ai toujours su que le salariat ce n’était pas pour moi. J’avais envie d’entreprendre. Et tout s’est enchaîné. J’ai demandé une rupture conventionnelle en 2014 et quelques jours plus tard , ma meilleure amie a rencontré Anaïs dans une soirée, elle avait envie de monter une marque de lingerie… Elle nous a présenté et ça a tout de suite matché! La marque a été lancée à Paris puis nous avons migré quelques années plus tard à Marseille ce qui est assez fou.
Peux-tu nous parler de tes grossesses?
J’ai un premier fils qui s’appelle Gaspard et qui a 8 ans et demi. Je l’ai eu à 30 ans. C’est une grossesse qui s’est bien passée. Après, j’ai trouvé que c’était difficile de devenir mère, si jeune. J’étais moins prête que lors de ma deuxième grossesse. Je pense que je n’avais pas fait le deuil de ma vie solo et ça a été éprouvant. Pour ce premier enfant, j’ai eu un accouchement long et difficile. Ça a duré 35 heures et ça s’est fini en césarienne d’urgence à l’hôpital Trousseau à Paris. J’avais aussi fait du diabète gestationnel, à l’époque on me demandait si j’attendais pas des jumeaux (si j’avais su!). Bref, c’était loooong. J’ai accouché à 41sa +4.
Ensuite, j’ai appris que j’étais enceinte de jumeaux. Ma première réaction a été de pleurer. Je pensais avoir une deuxième grossesse un peu douce après une première un peu difficile et puis bon. C’est la vie! Et puis on a ni l’un ni l’autre de jumeaux dans nos familles. Après quelques recherches je crois que la soeur de ma grand mère aurait eu deux paires de jumeaux mais je suis la seule à en avoir autour de moi dans la famille! Pour la première écho, j’étais seule. J’ai croisé ma sage-femme qui m’a dit : « Allez je te fais une petite écho! » et elle n’a même pas eu besoin de me le dire, je l’ai vu à l’écran. J’étais abasourdie. La première réactio de mon mec a été de me proposer « On recommence tout à zéro! » On était pas hyper chauds mais c’est comme ça. Le gynéco a cru l’espace d’un instant qu’il n’y avait qu’un seul cœur qui battait. Et puis non. C’est là qu’on s’est dit : « Allez c’est parti! »
Comment s’est passée cette grossesse gémellaire?
Pour la deuxième grossesse, j’ai eu du diabète gestationnel mais un peu plus fort encore… Le côté double plaisir. Heureusement j’ai pas trop galéré, j’ai réussi à aller jusqu’au terme. J’ai tiré jusqu’à 38 semaines en espérant que ça se déclenche naturellement mais… ce n’est jamais arrivé! J’avais pris 21kg, j’avais un ventre énorme. Énorme. A tel point que les gens me pointaient du doigt dans la rue…
Comment s’est déroulé cet accouchement?
J’ai beaucoup insisté pour avoir un accouchement naturel mais pour eux il y avait trop de risques liés à mon utérus cicatriciel… Il y avait un risque de déchirure jusqu’à la dernière minute donc j’ai encore eu une césarienne. Mais cette fois c’était beaucoup plus cool, parce que ce n’était pas dans l’urgence. C’était calme, ça s’est bien passé, ils sont sortis en 15 minutes top chrono!
Problème : j’ai eu énormément mal… À J3 j’ai ressenti une douleur atroce à la cicatrice. En fait, elle s’était ouverte, mais pas la cicatrice que je voyais, la cicatrice interne. Donc j’ai cru que j’allais mourir. J’ai appris que ça s’appelait une « éventration ». Heureusement mon mec était là et il assure. Après cette opération, tout est rentré dans l’ordre.
As-tu allaité?
J’ai un peu allaité Gaspard mon premier fils et les jumeaux en mode mixte mais je me prenais trop la tête. Je l’ai fait pendant deux mois parce que je me culpabilisais toute seule… Mais j’ai arrêté et le biberon c’était beaucoup plus simple. J’avais pris une veilleuse de nuit donc c’était compliqué d’allaiter.
Parle-nous de ton post-partum…
Ça peut paraître fou mais je dirais que j’ai trouvé ça plus difficile pour Gaspard que pour les jumeaux. La première fois je n’étais pas aussi prête à devenir maman, j’avais déjà fait des dépressions anxieuses avant donc je pense que j’ai fait une dépression post partum, 8-9 mois après l’accouchement. Rien de dramatique, c’est parti rapidement avec des antidépresseurs.
Les jumeaux c’était différent. Je savais qu’on partait à la guerre et je savais aussi que “tout passe”. Ensuite, on était mieux organisés. On avait pris une veilleuse de nuit, on avait une aide à domicile pour le soir. Comme je n’ai pas de problème à faire confiance à quelqu’un dont ce n’est pas le métier, j’ai réussi à trouver quelqu’un de super avec qui j’ai eu un très bon feeling. Cette dame nous a aidé pendant 4 ans et grâce à toutes ces choses qu’on avait mis en place, j’ai trouvé que c’était moins dur que pour mon premier enfant.
ET CÔTÉ CORPS ?
Quel est le truc qui t’as le plus fasciné ?
Évidemment que mon corps arrive à produire 2 parfaits bébés en même temps c’est un truc qui est fascinant. J’avais 5-6kg de bébé dans le ventre donc je suis reconnaissante envers lui. Et en plus j’ai eu une grossesse cool, j’ai pas eu de prématurés, je suis même persuadée que j’aurais pu aller plus loin dans ma grossesse!
Qu’est ce qui t’as le plus surpris ? Ce à quoi tu ne t’attendais pas ?
Mon corps a pris cher d’un point de vue santé. Si je prends la période des trois premières années j’ai eu une pelade par exemple. C’est un peu comme du psoriasis. C’est une maladie auto-immune. Un médecin m’a dit que c’était dû aux hormones. J’ai aussi eu un stérilet en cuivre, je sais pas si ça a joué mais j’ai aussi eu des poussées de rhumatismes… J’ai enchaîné les problèmes de santé alors que je n’en ai jamais eu. Pour le psoriasis c’est vraiment douloureux, ça fait des croutes, je devais m’envelopper de cellophane. Un en-fer. A la fin j’ai fait un truc radical : un traitement roaccutane. Et depuis c’est parti dieu merci… J’ai enlevé mon stérilet aussi. Je pense que tout cet enchaînement c’était le pot pourri de mon post partum, mon corps a vraiment souffert de ces fluctuations hormonales énormes. Et ce n’est pas sans conséquence.
Comment as-tu aimé ce nouveau corps?
Mon corps, mon corps… J’ai d’abord réglé les problèmes de santé que j’ai eu et qui se sont enchaînés. Mais c’est sûr que j’avais le ventre très abîmé par ces grossesses. Et j’ai eu envie d’autre chose. Il y a peu de temps j’ai fait une opération un peu lourde : une abdominoplastie. On m’a enlevé 1 kg de peau, 2 litres de graisse et surtout recousu les abdominaux. Je suis restée 4 jours à l’hôpital et disons-le j’ai jonglé. On m’a enlevé de la graisse dans le dos c’est très très douloureux. J’ai passé un mois à appliquer des poches de glace. Je l’ai fait parce que mon corps, je ne le reconnaissais plus. J’avais une espèce de bouée, une bedaine… C’était complexe. Surtout quand t’habites au bord de la mer! J’ai mis du temps à envisager cette opération. Mais j’ai vu des copines se refaire les seins après leur grossesse par exemple, elles étaient tellement bien dans leur corps. Ça m’a donné envie. Et aujourd’hui, je suis super contente, je n’ai plus de complexe. J’ai retrouvé mon ventre normal, que j’aime.
C’est quoi tes tips ?
Ne pas culpabiliser à demander de l’aide. Quand t’es épaulée, quand t’es aidée, tu vis mieux ta maternité. C’était vraiment si précieux d’avoir Salia, la dame qui nous a aidé avec les enfants pendant 4 ans. Quand on a quelqu’un qui aide, on arrête de compter les points dans son couple. Je vois tellement de mères qui sont épuisées, qui n’ont plus confiance… Juste quelques heures même. Quelqu’un qui va chercher tes enfants, donner le bain, même si tu es dans la maison ça change tout. Depuis quelques années on a arrêté mais je pense qu’on va reprendre quelqu’un quelques heures car j’ai des projets professionnels et j’ai envie de me consacrer à ça aussi.
Quels comptes Insta t’inspirent sur la maternité ? Des podcasts, films, livres qui t’ont aidé pendant tes grossesses ou sur la parentalité ?
J’ai adoré le livre « Liv Maria » qui traite du désir de la fuite de la mère, de toute l’ambiguité entre le rôle animal fusionnel et le besoin de se réaliser en tant de femme. Ça parle aussi de la gestion de tes propres traumas. J’ai lu aussi « Sauvage » de Julia Kerninon toujours, qui parle d’une cheffe épanouie professionnellement mais mère de famille à côté. C’est très intéressant de lire ces problématiques, ça touche beaucoup de mères… Le fameux équilibre vie pro et perso je trouve qu’elle en parle à merveille